Du béton au béton décarboné

 

Béton armé, béton de calage de bordures, ou béton de tranchée… À chaque usage, sa formulation ! Car derrière l’apparente simplicité de ce matériau universel se cache une véritable alchimie des matériaux.

Chez Néolithe, la réflexion commence bien en amont du chantier. Et si la décarbonation du béton passait justement par une nouvelle génération de granulats, fabriqués à partir de déchets non recyclables ? C’est le projet porté par Néolithe.

Au cœur de cette recette, un ingrédient essentiel : les granulats fabriqués à partir de déchets non recyclables, appelés déchets ultimes.
Comment assurer à la fois la résistance, la compacité et la durabilité de ce béton décarboné ?
 

Rencontre avec Martin Redonnet, technicien applications granulats et Ronan Hamelin, responsable commercial granulats. 

Anthropocite®, le granulat conçu à partir de déchets

«Nos granulats sont fabriqués à partir de déchets non-recyclables», explique Ronan Hamelin. «C’est un vrai levier écologique, mais cela impose des exigences en termes de formulation.» 

Appelé Anthropocite®, ce granulat est le fruit du procédé de Fossilisation Accélérée® développé par Néolithe. Destiné à des bétons non structurels, il répond à des critères précis, à commencer par une densité minimale de 1,5 t/m³, indispensable pour garantir ses performances. Et il ne se contente pas de remplacer une partie des granulats naturels, il stocke également du carbone. 

Pour intégrer un tel granulat, il faut d’abord le caractériser finement. «On commence par des tests d’absorption d’eau, pour mesurer leur porosité», explique Martin Redonnet. «Cela influence directement la quantité d’eau nécessaire à la formulation du béton. Un granulat trop poreux absorberait trop d’eau, ce qui fausserait les dosages.» 

Formulation du béton : l’équilibre des composants

Une fois les propriétés du granulat bien connues, commence le travail d’ajustement. «Chaque béton a une fonction, une exigence propre, qu’il s’agisse d’un béton armé, béton de calage de bordures, ou béton de tranchée», détaille Ronan. Intégrer jusqu’à 20% de granulats Anthropocite®, tout en assurant la performance mécanique et la maniabilité, demande une formulation sur-mesure. 

Ce processus passe par la fabrication d’éprouvettes testées à différents âges (7, 14 et 28 jours) pour vérifier la résistance du béton à la compression. «On mesure aussi la consistance du béton frais avec le cône d’Abrams», complète Martin. «C’est ce qui nous dit si le béton est assez fluide ou trop ferme pour être mis en œuvre correctement.» 

Au centre de cette formulation : le rapport eau/ciment, dont dépend à la fois la résistance et la maniabilité du béton. «Trop d’eau, et le béton perd en résistance. Pas assez, et il devient ingérable», résume Martin. Trouver l’équilibre est un art délicat. 

Tester, observer, ajuster : le béton sous contrôle

Chaque formulation est soumise à une batterie de tests en laboratoire, puis sur le terrain. «Le test d’air occlus est particulièrement important», ajoute Martin. «Il permet d’anticiper la résistance du béton contenant des Anthropocite® aux cycles de gel/dégel, un critère crucial pour sa durabilité.» 

Rien ne remplace les essais in situ, sur des chantiers pilotes. «Cela nous permet d’observer le comportement réel du béton», souligne Martin. «Comment il se place, comment il réagit aux conditions météo, s’il y a des signes de ségrégation*… Ce sont des éléments qu’on ne peut pas toujours anticiper en laboratoire.» Ces retours terrain sont essentiels pour finaliser une formulation avant son passage à l’échelle.

* La ségrégation du béton désigne un défaut de mise en œuvre qui se manifeste par la séparation des différents constituants du béton frais, principalement les gros granulats (cailloux) et la pâte cimentaire (mélange de ciment, eau et fines). 

Coulage : l’épreuve de vérité

Le moment du coulage vient sceller tous les choix techniques. Et c’est aussi celui où les conditions réelles (pluie, chaleur, vent) peuvent remettre en question les équilibres trouvés en amont. 

«C’est là qu’on voit si tous les choix faits en laboratoire ont été les bons», affirme Martin. La qualité des granulats devient alors décisive. «Leur granulométrie, leur forme, leur propreté… Tout influence la fluidité du béton, sa compacité, et donc sa résistance finale.» Un granulat bien calibré permet d’éviter la ségrégation, assure une bonne répartition du ciment et garantit une finition durable. 

Un béton décarboné

Loin d’être un simple substitut, l’Anthropocite® incarne une nouvelle approche de la fabrication du béton, décarboné, sans compromis sur la qualité, dans le cadre de ses usages. 

Et la démarche ne s’arrête pas là. «Nous explorons encore de nouvelles sources de déchets et étudions l’emploi de nos granulats dans le béton structurel», conclut Martin. «Cela demandera d’autres tests, d’autres ajustements. Mais c’est le cœur même de notre mission : faire progresser le béton vers un avenir plus résilient !» 

Perspectives

La décarbonation du béton est un défi majeur pour l’ensemble du secteur de la construction. Sa production, fortement dépendante du ciment, implique des procédés industriels difficiles à décarboner et une demande qui ne cesse de croître à l’échelle mondiale. L’ampleur de l’enjeu nécessite une mobilisation collective de l’ensemble de la filière et des solutions complémentaires. Néolithe ne pourra, à elle seule, transformer en profondeur l’industrie du béton.   

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